Orienter l’épargne des français vers le résidentiel grâce à un fonds dédié

A quelques mois des élections présidentielles, l’ASPIM vient de publier 11 propositions pour dessiner l’immobilier collectif de demain. Face au défi structurel actuel, il est important d’offrir un immobilier résilient, inclusif et performant.

Pour répondre à ces enjeux, l’ASPIM propose la création de fonds logement aux loyers abordables et ouverts à l’épargne publique.

Une offre locative de moins en moins abordable

La France fait face à un défi structurel d’envergure, celui de pouvoir loger des milliers de français tout en proposant des loyers abordables. D’une part, il faut augmenter l’offre du parc immobilier actuel, notamment au sein des zones tendues, et d’autre part, les rendre accessibles aux personnes considérées comme trop aisées pour prétendre au logement social mais pas assez riches pour accéder au marché libre. L’objectif proposé par l’ASPIM est de 500 000 logements à loyers abordables à horizon 2040.

La première problématique est donc d’ordre quantitatif. L’offre résidentielle peine à répondre à une demande croissante de la part des mal-logés. Il y a un véritable déficit et le sujet se doit d’être central dans les mois à venir. D’après les chiffres évoqués dans la note rédigée par l’ASPIM, la France doit construire ou réhabiliter près de 4 millions de nouveaux logements. Cependant, les promoteurs sont confrontés à de nombreuses restrictions ne leur permettant pas d’augmenter le nombre de logements mis en chantier. De plus, les promoteurs sont aussi dépendants de la solvabilité de ceux qui se positionneront sur ces logements. En effet, les conditions se durcissent et ne favoriseront pas l’accès au logement dans les années à venir. Bien que les taux d’intérêt aient atteint des niveaux extrêmement faibles ces dernières années, il se pourrait que les banques centrales orientent leurs politiques monétaires vers une hausse des taux pour limiter la hausse des prix.

L’accès au crédit des dernières années (à son plus bas historique en 2021 autour des 1,10% d’après les données Banque de France) aura en effet eu comme conséquence la montée des prix. Selon l’INSEE, l’indice de prix des logements a connu une hausse de 22% entre 2010 et 2020 sur l’ensemble du territoire métropolitain et pour tous types d’habitats confondus (maison et appartement, neuf et ancien). Sur un an, les prix de l’immobilier neuf ont même augmenté de 5,7% (Novembre 2020 - 2021) d’après le spécialiste de l’immobilier neuf, Le Laboratoire de l’Immobilier. Rennes enregistre d’ailleurs la plus forte hausse, de près de 10% sur un an et désormais au-delà des 5000€ du m2. Il y a d’ailleurs moins de propriétaires en France que dans des pays comme l’Espagne ou l’Italie dont le taux de propriétaires est supérieur. Il en est de même pour le loyer qui continue d’augmenter. Or, compte tenu de la montée des prix, il se pourrait que la répartition propriétaire/locataire change avec plus de locataires que de propriétaires dans la prochaine décennie. Il y a donc un vrai sujet à l’idée de garder les loyers abordables. Ces derniers l’ont été jusqu’alors de part les politiques publiques menées et la mise en place de nombreux dispositifs fiscaux limitant les loyers à un plafond précis selon la zone. 

Enfin, l’émergence de la thématique RSE et l’exemplarité en termes de performances énergétiques dont doivent faire preuve les logements impliquent la mise en place de travaux coûteux. Une baisse des prix potentielle ne doit donc pas être au détriment la qualité de la construction.

Une épargne à des niveaux records

Les collectes du livret A et de l'assurance-vie ont enregistré des niveaux records pendant des mois depuis l’arrivée de la pandémie. Selon les chiffres publiés par la Banque de France, l’épargne accumulée pendant la crise devrait atteindre 180 milliards d’euros fin 2021, soit 7% du PIB. Compte-tenu du fort attrait des français pour l’immobilier, il apparaît alors évident qu’une partie de cette épargne se doit d’être redirigée vers la construction ou la rénovation de nouveaux logements.

Plus précisément, la pierre-papier est une classe d’actif particulièrement plébiscitée par les épargnants. Par exemple, les SCPI représentent au 30 septembre 2021 plus de 70 milliards de capitalisation. De plus, le résidentiel semble aujourd’hui encore plus attractif que l’immobilier tertiaire ou commercial. L’un fait face à l’arrivée du télétravail et un éclatement nouveau des bureaux sur le territoire et en régions. L’autre a d’une part fortement subi les nombreuses restrictions et fermetures successives de ces derniers mois en plus d’être confronté au e-commerce et au digital. Cela se confirme aussi par les chiffres avec des valorisations de foncières logements cotées qui affichent de meilleurs résultats qu’il y a quelques mois.

Ce que propose l’investissement résidentiel est guidé par la volonté de répondre à un défi structurel. Les épargnants étant en quête de sens, il s’avère pertinent de leur proposer une vraie solution d’épargne autour d’un fonds résidentiel dédié. Cette quête de sens s’est d’autant plus confirmée avec l’émergence des enjeux ESG dans la gestion d’actifs ces dernières années.

Les institutionnels en capacité de répondre à ce défi

Les français sont de plus en plus nombreux à investir en direct, témoignant une fois de plus de leur intérêt dans la pierre. Parmi ces investisseurs, nous retrouvons de nombreux investisseurs locatifs, que ce soit dans l’ancien ou dans le neuf. Or, les investisseurs locatifs ont, pour la plupart, des crédits à rembourser limitant leur capacité d’investissement et notamment leur propension à réaliser des travaux et à veiller à la bonne tenue du logement. Il en est de même que les actifs résidentiels sont, pour la plupart, des copropriétés. Dans ce cadre, cela peut potentiellement nuire à la prise de décision, au détriment des locataires et des performances de l’immeuble. Le coût généré par l’entretien et/ou la rénovation des parties communes, par exemple, peut ne pas être une préoccupation première des propriétaires si ces derniers ont l’objectif de vendre prochainement.

La monopropriété peut dès lors être une première solution. L'ASPIM insiste sur le fait que les investisseurs institutionnels possèdent une expertise forte dans la gestion d’actifs cultivée par leurs investissements historiques en actifs de bureaux et de commerces, entre autres. Ils profitent également de moyens plus importants leur donnant accès à des outils de gestion digitaux et opérationnels, de manière à gérer leurs locataires efficacement. A ce titre, la présence de plusieurs locataires mutualise le risque limitant les problèmes de solvabilité et facilitant le pilotage de l’immeuble en question. Une autre problématique est celle liée aux incitations fiscales. En effet, les dispositifs PInel et Duflot notamment, impliquent de respecter des plafonds de loyers destinés à habiter les ménages éligibles au parc social. De nombreux investisseurs particuliers sont propriétaires de biens destinés uniquement aux gens les plus modestes. Une catégorie de ménage ne peut donc ni accéder au parc social et ne peut pas non plus supporter les loyers du marché, trop élevés. Les besoins sont donc nombreux et les fonds institutionnels peuvent véritablement apporter des solutions.

La création de fonds logements dédiés au logement abordable

Un fonds logement est un fonds qui investit uniquement dans des actifs résidentiels. Ces derniers regroupent les logements, les résidences étudiantes et seniors, les immeubles de coliving ou de colocation, les actifs mixtes à majorité résidentielle…

Ces fonds agiraient sur trois catégories bien distinctes :

  • les logements intermédiaires (LLI) neufs : on parle ici de logements à loyers maîtrisés, c’est-à-dire des logements destinés aux familles trop aisées pour accéder au parc social mais pas suffisamment riches pour les loyers du marché. Les loyers sont plafonnés (avec 20% de décote) et dépendent de plusieurs conditions 
  • les logements abordables contractualisés (LAC) neufs : ne dépendent d’aucune catégorie juridique et réservés aux institutionnels qui achètent en bloc à prix décoté. Les logements sont mis en location avec une décote sur le loyer à hauteur de 10%
  • les logements abordables contractualisés (LAC) réhabilités : l’objectif est de participer aux réhabilitations du patrimoine existant et de garder les mêmes principes que le LAC neufs

Pour que ces fonds puissent se positionner sur ces différentes catégories d’actifs, ils pourraient utiliser l’important montant épargné par les français ces derniers mois. En effet, via des véhicules d’investissement ouverts à l’épargne publique, les sociétés de gestion pourront profiter d’une source de collecte importante. Il s’agira ensuite de jouer sur des canaux de distribution efficaces via notamment des réseaux de conseillers en gestion de patrimoine, des plateformes spécialisées voire même directement auprès des porteurs de parts finaux. Il est également envisagé d’intégrer ces fonds en tant qu’unité de compte au sein d’assurance-vies au cadre fiscal avantageux.

Enfin, pour optimiser la construction de l’ensemble de cette chaîne de valeur, différentes incitations fiscales peuvent être mises en jeu tant au niveau des investisseurs porteurs de parts que des sociétés de gestion acheteuses des actifs. D’une part, l’ASPIM propose d’appliquer le même régime de TVA pour les actifs résidentiels que pour l’immobilier commercial, de manière à ce que cette TVA soit récupérable pour les investisseurs. Cette TVA récupérable aurait pour bénéfice un gain immédiat à l’acquisition potentiellement compensée par une faible TVA applicable sur les loyers étalées dans le temps (cette TVA sera de toute façon prise en charge par l’investisseur, le loyer devant rester inférieur au loyer marché même après prise en compte de la TVA). En l’état, le LLI Neuf supporte une TVA de 10%, contre 20% pour le LAC Neuf. Cela aurait également pour objectif de réduire la valeur du neuf avec l’ancien (TVA non supporté par l’ancien) au moment de la remise sur le marché. L’ASPIM propose également de réduire les droits d’enregistrement et de compenser la taxe foncière via la mise en place d’un crédit d’impôt. L’ensemble des détails pour chaque catégorie d’actifs est à retrouver ici: "Les fonds logement, pourquoi et comment drainer l’épargne des Français vers le résidentiel intermédié?".

Au niveau du souscripteur, et ce de manière à optimiser le rendement du fonds jusqu’au bout, il est proposé d’agir sur l’écart entre le rendement net du fonds et le montant final perçu par le souscripteur. Cela peut passer par une réduction de l’assiette de l’IFI en faisant profiter d’un abattement de 50% de la valeur des parts souscrites par l’investisseur mais également par la mise en place d’un amortissement notionnel par année de 1,5% sur les dividendes distribués pour les parts qui distribuent (récupéré ensuite au moment de la revente avec majoration sur la plus-value de 1,5% par année de détention) et une diminution de la plus-value imposable pour les parts qui capitalisent (réduction de 1,5% fois le nombre d’année de détention, plus intéressant fiscalement dans ce cas).

En clair, les aménagements proposés compensent largement les effets négatifs provoqués par les plafonds de loyers (liée aux décotes) et l’application d’une faible TVA sur les loyers facturés. Cela permettrait d’augmenter le rendement du fonds, de rendre crédible cette nouvelle alternative de fonds résidentiel et de faciliter son lancement.

Impact des avantages sur le rendement estimé par l’ASPIM

Pour conclure, l’offre locative doit donc être abordable et ce de manière à répondre au défi du logement. L’Etat doit accompagner les investisseurs dans une démarche collective, en mobilisant l’épargne accumulée vers des projets rentables et intégrés aux enjeux structurels actuels.

FR : SCPI, Stratégies d'investissement   FR : Rock & DATA   FR : décembre 27, 2021

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